Je me lève le matin vers les 8 h. J’entends déjà les enfants qui commencent l’école devant la maison. Ils répondent à l’unisson à leurs professeurs qui leur enseignent le français. « Comment ça va? Ça va bien merci. Et vous? », répètent une cinquantaine de jeunes. Je fais bouillir de l’eau et je prends ma douche en me versant un seau d’eau sur la tête. Ensuite, je sors dans la cour en passant par la chambre à côté de la mienne, dans laquelle 4 ou 5 gars dans la vingtaine-trentaine sont encore entrain de dormir. Ils resteront là pour encore quelques heures avant de se réveiller pour aller jouer aux cartes dans la rue avec leurs amis.
Je déverrouille la porte de la cuisine et je me fais bouillir de l’eau avec le brûleur à gaz et une petite carafe en métal. Pendant que l’eau se met à bouillir, je sors dans la rue pour rencontrer les femmes devant l’école qui vendent du pain et des sandwichs. Je leur remets 50 francs en échange pour un bout de baguette, et je leur dis « jerejef », « merci! ».
J’éteins le gaz et je verse l’eau bouillie dans ma tasse de cristaux de café instantané Nescafé. J’ajoute le sucre et le lait en poudre et je remue bien pour m’assurer d’une dilution satisfaisante des poudres. J’apprécie ensuite ma baguette en écoutant au calme de la matinée. Personne n’est encore debout, donc on n’entend que les enfants dans l’école devant. J’écoute une partie de podcast pour quelques minutes, avant de paqueter mon sac avec mon ordi et mes deux bouteilles d’eau pour la journée.
En sortant dans la rue je dis « salamaalekuum » aux femmes qui font la lessive sur le trottoir à côté de la maison. Je leur souhaite bonne journée et j’entame ma marche vers le bureau, situé à environ 15-20 minutes de chez moi. Je traverse plusieurs moutons et coqs qui font de la rue 5 leur chez-eux et je serre la main des enfants qui s’approchent de moi en criant « toubab toubab toubab! ». Plus loin sur ma route, j’observe le travail ardu des centaines d’hommes qui travaillent dans les fabriques à chaussures, sandales et talons hauts.
Fabrique à chaussures - rue 11, Médina
En arrivant à l’AFEME, je salue la famille de la présidente et je rentre au bureau, situé à côté de la cour intérieure. Ici, je m’installe pour ma journée de travail. Je prends une pause au dîner pour déguster le riz au poisson (thiéboudienne) que nous a préparé la sœur de la présidente. Au cours du repas, Mami, la fillette de 18 mois qui se promène dans la cour toute la journée, me tape le dos ou crie parce qu’elle veut de l’attention immédiate.
Avant de partir du travail, Awa, la domestique de la maison/bureau m’offre un thé sénégalais bien sucré dans une mini-tasse. Après avoir dégusté, je pacte mes affaires et c’est le retour à la maison vers les 17 h. En route j’arrête à la boutique pour ramasser une bouteille de 10 L d’eau minérale, comme l’eau du robinet à la Médina laisse parfois à désirer.
Je dépose mon sac dans ma chambre à la maison et je me change pour aller faire du jogging sur la Corniche , la route qui longe l’océan atlantique et qui est à trois minutes de la maison. Je jogge pour environ une heure en observant le fabuleux soleil couchant à l’ouest. Je fais environ 10 km aller-retour, en dépassant le cimetière musulman, les centaines de travailleurs au marché des poissons Soubédioune, le parc thématique Magic Land, l’hôtel Terrou-Bi et la plage de Fann où s’entraînent lutteurs et joueurs de foot. Enfin, après avoir dépassé le siège bien protégé de la Banque mondiale, j’arrive à la place du souvenir, une grande esplanade longeant l’océan et ornée d’un énorme monument en forme du continent africain qui donne l’allure d’être suspendu sur la mer. Après avoir repris mon souffle quelques instants, je reprends la même route pour retourner à la maison dans la lueur du soleil couchant.
Marché des poissons à Soumbédioune
Place du souvenir
Avant le repas qui sera servi vers les 21 heures (après la dernière prière de la journée), je vais m’acheter quelques arachides fraîchement grillées dans une cuvette de sable chauffé au charbon. Cela me tient aller jusqu’au souper. Pour le reste de la soirée, je lis un peu, je discute un peu, je regarde un peu le bulletin de nouvelles, sinon un téléroman espagnol ou indien traduit en français…
Quand je sens la fatigue, je souhaite « fananal ak jam » « bonne nuit » à ma famille et à mes amis dans la chambre d’à côté et j’enfile mes bouchons d’oreilles afin d’entrer dans le monde des rêves sans trop être dérangé par le bruit de ce quartier populaire qui ne dort jamais.